Yessis n Teryel

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    Paroles de femmes de Kabylie, par Nicole Logeais

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    Date d'inscription : 17/10/2006
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    Paroles de femmes de Kabylie, par Nicole Logeais Empty Paroles de femmes de Kabylie, par Nicole Logeais

    Message par Admin

    A plusieurs reprises, la presse française, notamment Le Monde, au lieu de s’intéresser à ce qui fait l’originalité du mouvement citoyen de Kabylie a eu tendance à le dénigrer par des jugements péremptoires, portés de très loin, comme « ce n’est pas un mouvement démocratique, il exclut les femmes » ... Pourtant, malgré le poids de la tradition, elles existent dans ce mouvement.


    A l’entrée du 26° « conclave »( assemblée) de la CADC ( coordination des archs, daïras et communes) de la wilaya de Tizi-Ouzou dans la commune des Aghribs, le mercredi 30 octobre, beaucoup d’hommes effectivement : ce sont les délégués élus des villages de la wilaya . Par tradition, non par interdiction, les femmes, à quelques exceptions près, ne sont pas déléguées . Pourtant une femme arrive, dans sa robe kabyle traditionnelle, digne, déterminée. C’est Djedjiga Mokrab, mère du jeune Azeddine assassiné à l’âge de 23 ans par les gendarmes de Larba Nat Yiraten, le 28 avril 2001. Les larmes plein les yeux, elle me décrit en kabyle cet assassinat : la douleur est intacte, pesante, mais vite, la colère chasse les larmes : « l’Etat me propose de l’argent ! Ce que je veux, c’est le jugement des assassins de mon fils et de toutes les victimes du printemps noir de Kabylie . Jamais nous ne cèderons. La Kabylie a été de toutes les luttes pour l’Algérie, elle n’a eu en échange, de la part du pouvoir d’Alger, que des balles ! ». C’est le message qu’elle va transmettre à ce conclave. C’est ce qu’elle crie partout ! Djedjiga était le 26 octobre devant le tribunal de Tizi-Ouzou où le délégué en détention, Bélaïd Abrika, était auditionné par le juge d’instruction, et elle criait « jugez les assassins, libérez les innocents. Vous n’êtes que des chiens aux ordres de Zerhouni » ( ministre de l’intérieur ). La foule, beaucoup d’hommes, l’applaudissait.
    Visite impromptue à Azeffoun, petit bijou de la côte kabyle, chez Djédjiga Bélaïdi, modéliste, qui nous accueille chaleureusement, rayonnante dans une superbe robe kabyle créée par elle . Autour d’un délicieux couscous aux légumes offert spontanément à ses deux avocats du collectif bénévole qu’elle ne cesse de remercier chaleureusement, elle parle de son engagement dans la lutte actuelle, de son engagement de toujours pour sa langue berbère couronné en 1995 par le 1° prix littéraire « Mouloud Mammeri » pour un recueil de nouvelles en langue berbère. Cette année, elle a participé à toutes les marches à Tizi- Ouzou pour la libération des détenus du mouvement citoyen de Kabylie. Son mari, Kader, délégué de Azeffoun a été arrêté, le 3 avril 2001 et mis en liberté provisoire le 5 août . « Le plus difficile, dit-elle, était de ne pas pouvoir lui rendre visite en prison car nous n’étions pas encore mariés, et notre mariage a dû être différé à cause de sa détention . Maintenant, j’ai moins peur, même si je sais que Kader, compte tenu des lourds chefs d’inculpation, peut à nouveau être arrêté à tout instant . Dès que la répression s’arrêtera, j’espère reprendre l’écriture. »
    A Tizi- Ouzou, à la sortie d’une audience, Khéloudja Khalfoun, avocate, m’explique comment , devant la terreur d’Etat qu’a été l’assassinat des jeunes de Kabylie, elle a réagi et contribué à créer, sous l’ égide du barreau de Tizi - Ouzou, un collectif d’avocats bénévoles pour la défense de toutes les victimes du printemps noir : familles de victimes, blessés, délégués en détention arbitraire, délégués en liberté provisoire. Depuis 20 mois, infatigable, de prisons en tribunaux, elle met toute son énergie dans cette cause. Sa détermination et son courage sont impressionnants, comme j’ai pu le constater lors de ses plaidoiries, à Azazga ou Larba Nat Yiraten. L’agression dont elle a été victime, avec cinq d’autres confrères du collectif, dans l’enceinte du tribunal de Tizi- Ouzou, le 13 octobre dernier, l’a révoltée mais pas intimidée : « C’était un acte grave et inédit dont l’objectif était de nous faire payer notre engagement aux côtés du mouvement citoyen de Kabylie. Mais notre journée nationale de grève, suivie totalement, a été l’expression de notre refus de courber l’échine face à l’arbitraire . Cependant, ma lutte en tant qu’avocate est liée à ma lutte pour l’émancipation de la femme kabyle qui subit , en plus de la tradition, l’infamant et discriminatoire code de la famille imposé par un pouvoir arabo- islamiste. C’est pour cette raison que je suis allée animer dans le village de Tifilkout une rencontre sur le thème : Kabylie, l’autonomie comme perspective d’avenir pour la condition féminine ; car en effet, le projet d’autonomie de la Kabylie s’inscrit en opposition avec l’idéologie arabo- islamiste ».
    A Tifilkout, dans son village natal , Kamira Naïd Sid, économiste, me rappelle que son engagement actuel dans le mouvement citoyen de Kabylie est la suite logique de son combat engagé depuis des années dans le Mouvement Culturel Berbère (MCB) puis dans une association de femmes. « Pendant le printemps noir, raconte-t-elle, révoltée par tant d’injustice, j’ai contribué à créer avec mon amie Faroudja un collectif de femmes du printemps noir pour dénoncer cette répression . nous avons organisé la marche historique du 24 mai 2001 à Tizi- Ouzou où 50 mille femmes ont répondu à notre appel . Je participe à toutes les marches et autres rassemblements et actions qu’organise notre Coordination. De plus, j’ai pris contact avec mon comité de quartier qui m’a élue comme déléguée à la coordination de Tizi- Ouzou . J’ai été la première femme à être élue dans une assemblée d’hommes. Cela n’a pas été facile : le mouvement citoyen n’a pas écarté les femmes mais la tradition pèse lourd alors aux femmes d’oser le changement. La tradition, la menace islamiste, le code de la famille, voilà nos 3 fronts de lutte en tant que femmes. Aujourd’hui, je suis convaincue que seule l’autonomie, par son contenu laïque et démocratique, est à même de nous aider à résoudre nos problèmes. » C’est cette conviction qui a poussé Kamira à faire du porte à porte dans son village, notamment pour sensibiliser les femmes au foyer, pour expliquer l’intérêt de ce projet et faire signer la pétition en faveur de l’autonomie.
    Quatre femmes, quatre formes d’engagements différents dans la lutte de la Kabylie pour « la dignité, la justice, l’identité » . Au-delà de la symbolique des quatre noms et des quatre parcours militants, ces femmes, par leur courage, fraient la voie de l’égalité et de la modernité.

    Nicole Logeais
    vendredi 19 septembre 2003

    http://http://www.udb-bzh.net/article.php3?id_article=60&var_recherche=femmes+kabyles
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